Notre exhu de la semaine nous emmène en Suisse et du coté de Pontarlier pour évoquer le souvenir du cinquième plus important constructeur français d'avant guerre, repreneur de Vinot-Deguingand et lui aussi tombé aujourd'hui dans l'oubli :
Tout commence en Suisse avec la création de la célèbre "Fabrique de moteurs Zürcher & Luthie" qui fournira autant de grands constructeurs de motos qu'Alcyon ou NSU pour ne citer qu'eux.
1904_ NSU-Zedel
1910_ Motogenêve-Zedel
1915_ Condor-Zedel
Rapidement le marché français devient le principal débouché de cette firme qui malgré l'omniprésence de De Dion-Bouton réussi à s'imposer sur ce marché émergent et prometteur du "cycle motorisé".
En 1901, ce motoriste neuchâtelois change de raison sociale en adoptant la dénomination "Fabrique de moteurs & machines ZEDEL" qui reprend tout simplement l'initiale des noms des deux créateurs.
Quelques années plus tard, nos helvètes se voient contraints par une nouvelle législation française d'installer une unité de "montage" puis de "fabrication" à Pontarlier (25) afin de contourner des droits de douane devenus prohibitifs et conserver ainsi ce marché nourricier.
Dès lors la croissance de la firme devient exponentiel et quasi incontrôlable pour les deux associés qui très vite vont perdre pied dans la gestion binationale de leur affaire dont le contrôle profitera à un certain Samuel Graf.
Ce fournisseur profita du flou artistique ambiant pour récupérer ses factures impayées par des titres Zedel et c'est ainsi qu'en 1906, le nouveau patron de la firme sentant le potentiel d'une diversification vers l'automobile crée la "Société Française des Automobiles ZEDEL".
1908_ Zedel 8cv
1912_ Zedel 12cv
Rapidement les liens se distendent entre l'entité suisse et son homologue française si bien qu'en 1908 le divorce est prononcé au profit de Graf qui s'adjuge au passage l'exclusivité commerciale du nom "ZEDEL" un coup du sort pour Ernest Zürcher qui verra débarquer par la suite en Suisse des automobiles Zedel que s'arracheront ses compatriotes aisés .
En effet, ce nouveau constructeur français connaît rapidement le succès grâce à la robustesse et à la modernité de ses produits qui iront même concurrencer la vénérable firme "Delaunay-Belleville" sur le marché très élitiste des monarques et empereurs en devenant la voiture favorite de la Reine Marguerite d'Italie.
Mais la grande faucheuse mettra un terme aux exploits de Samuel Graf qui découragé par tant d'obstacles à franchir pour redonner le faste d'avant guerre à Zedel passera la main en 1919 à l'industriel aéronautique Jérôme Bonnet célèbre pour ses hydravions qui équipèrent les alliés durant ce premier conflit mondial.
Cet homme d'affaire d'origine ... suisse va propulser la marque au premier plan par une politique commerciale audacieuse et un sens de l'anticipation hors du commun qui lui aura permit de se reconvertir dans l'automobile quelques mois avant la désastreuse crise aéronautique de l'après armistice .
Rapidement la fabrication de modèles luxueux est mise de coté au profit de voitures plus populaires construites en série ... à Gennevilliers dans l'ancienne usine d'hydravions au détriment du site historique franc-comtois qui fermera ses portes en 1929 car trop excentré économiquement.
Le succès du type G incite le nouveau patron à investir massivement dans la construction d'une vaste usine ultra moderne à l'américaine à Nanterre en lieu et place des ateliers de la marque "Vinot Deguingand" qu'il vient d'absorber.
Ce complexe industriel de 75000 m2 est inauguré en 1923 et à cette occasion la marque adopte le dénomination unique "DONNET" mettant fin ainsi à l'appellation "ZEDEL" jusqu'alors associée .
La firme fera une incursion rapide sur le marché des utilitaires sous la marque "Duguingand" mais sans grand résultat cette diversification sera vite abandonnée !
L'usine est impressionnante et sa conception permet à la firme de rentrer dans le club des grands constructeurs avec qui elle croise le fer partout en Europe grâce à un vaste et efficace réseau de concessionnaires.
Si "Donnet" a réussi son pari en devenant le 5ème constructeur national avec une gamme allant de la 4cv bicylindres conçue par l'ingénieur Violet à la 11cv 6 cylindres de l'ingénieur Grégoire, la firme n'aura malheureusement pas le temps d'amortir les investissements colossaux qu'elle a entrepris à Nanterre car la grande crise économique va lui briser net son élan et l'issue en sera tragique puisque ruiné Jérôme Donnet ne trouvera jamais les capitaux indispensable à l'étude d'une nouvelle gamme de voitures modernes et il jette ainsi l'éponge en se retirant de la scène automobile en 1934 tout en conservant un trésor de guerre que beaucoup lui envie : son usine de Nanterre.
Il pense tenir sa bonne affaire avec Henri-Théodore Pigozzi le Directeur Général de Simca qui cherchait à accroitre sa capacité de production mais la vente fut annulée par le tribunal de commerce qui nomma un syndic de faillite chargé d'organiser une adjudication sur l'ensemble de la socièté Donnet .
Finalement en fevrier 1935, Simca remporta l'ensemble du stock d'invendus, les brevets, la dénomination commerciale et la fameuse usine de Nanterre à laquelle Pigozzi et l'état major de Fiat tenaient tant !
Cependant, cet important stock de Donnette , Donnastar ou Donnasix embarrasse la future firme à l'hirondelle car ces automobiles démodées sont quasi invendables et c'est un soulagement lorsque la socièté Contin se propose de reprendre le tout pour le revendre sous la marque commerciale DONNET-CONTIN ... sans plus de réussite et après 1936 plus personne n'entendra parler de cette marque qui aurait pu parvenir jusqu'à nous si la conjoncture économique eu été différente !
Concernant le site de Nanterre, Simca après avoir transférer sa production à Poissy ex Ford SAF, revendra l'usine à Citroën en 1958 qui y installera sa fonderie d'aluminium.
Qu'est devenue cette usine aujourd'hui ??? si quelqu'un à une réponse et / ou des documents j'en serai ravi !