Bravo à tous ceux qui ont reconnu cette LA BUIRE en pleine action en 1907 lors de la Course du Mont Ventoux et merci à JP pour certains clichés de cette dernière exhumation 2009 !
Avant de nous retrouver le mois prochain je vous souhaite à tous de passer de très bonnes fêtes de fin d'année ... bonne lecture en tout cas ! Pitcats
Les « Chantiers de La Buire » sont une vaste entreprise spécialisée dans la construction de matériels roulant ferroviaire crée en 1847 dans le quartier lyonnais du même nom par Frossard de Saugy.
L’entreprise est si renommée dans son domaine qu’elle fut chargée de concevoir le train du Roi d’Italie qui lors d’une visite au Tsar de toutes les Russie fut lui-même impressionné par la réalisation du wagon « chapelle » du tout nouveau convoi impérial.
Cependant, le dernier tiers de ce siècle fut marqué par une crise qui affecta l’industrie ferroviaire et La Buire connu alors une brusque baisse de son activité qui fragilisa l’entreprise.
Elle ne du son salut qu’à son rachat par la « Compagnie des Fonderies et Forges de l’Horme » qui pour sortir la belle lyonnaise de sa léthargie diversifia son activité notamment dans la production de métiers à tisser où la demande en équipement était forte.
Les dirigeants de la firme s intéressèrent très tôt à l’automobile avec notamment le fameux tricycle à vapeur conçu par Léon Serpollet si bien qu’un accord de production est finalisé en 1890.
Serpollet livre alors à La Buire ses chaudières que ce dernier monte sur les châssis construits dans un petit atelier de l’usine lyonnaise.
Cet embryon de fabrication automobile sera une expérience concluante car les tricycles La Buire trouvent preneur mais cette activité reste pour le moment extrêmement marginale car à l’aube du nouveau siècle la demande en matériel ferroviaire connaît une telle croissance que la « Société Nouvelle des Établissements de l'Horme et de La Buire » se consacre encore exclusivement à la fabrique de wagon, tramway et de matériel industriel électrique ( après son rachat par la société suisse « Alioth » ) tout en conservant son activité de mécanique textile.
La Buire prend conscience que la traction animale sera à terme supplanter par la motorisation galopante des moyens de transport si bien qu’elle décide dès 1897 de produire sous licence à la fois les fameux trains roulants « Scott » et les gazogènes « Delamare-Deboutteville » à l’origine de la première automobile à moteur à explosion.
Rapidement, l’entreprise pressent que cette fois le marché de l’automobile particulière amorce son développement durablement si bien qu’elle crée officiellement en 1905 sa filiale automobile : « La Société Anonyme des Automobiles La Buire ».
L’entreprise offre à l’automobiliste la même attention dans le soin apporté à la fabrication de ses automobiles qu’aux exigeants voyageurs de l’Orient Express dont les luxueux wagons sortent du même complexe industriel.
Cette division autonome est gérée par deux professionnels de l’automobile ayant prouvé leurs talents l’un en tant qu’ingénieur référant chez « Rochet-Schneider » pour Berthier et l’autre en tant que constructeur automobile pour Audibert jusqu’alors associé à Lavirotte pour la marque du même nom.
Leur impulsion conjuguée va donner à la firme un élan spectaculaire tant en terme de politique commerciale qu’en terme de prouesse technique.
Le bureau d’études est parvenu à concevoir une boite de vitesses remarquablement silencieuse couplée à une motorisation dynamique et sobre mais tout autant discrète si bien que la jeune marque automobile connaît une consécration européenne qu’elle saura parfaitement utiliser lors du Salon de l’Automobile puisque son stand sera au cœur des discussions.
Ajoutons à cela de belles performances en compétition grâce à un fabuleux châssis alliant la robustesse à la légèreté avec la particularité d’une voie avant réduite pour davantage de maniabilité et l’avenir semble tout tracé pour « La Buire ».
En 1907 la firme utilise les synergies existantes entre ses branches ferroviaire et automobile pour investir le marché des omnibus puis des véhicules utilitaires dont la plus grande réussite sera de remporter le marché public de la fourniture de véhicules à l’administration des Postes & Télégraphes.
La firme se développe très rapidement en créant de nouvelles entités commerciales mais cette croissance se fait au détriment de la bonne gestion de ses ressources.
Dès 1909, des signes alarmants de cessation de paiement se font sentir parmis certaines de ses filiales aux pieds d’argile obligeant le groupe à trouver des fonds importants destinés à leur renflouement.
Malgré l’injection de sommes énorme, la situation s’empire chaque jour d’avantage car La Buire doit répondre aux créanciers toujours plus nombreux de ses filiales défaillantes si bien que fin 1909 le groupe se retrouve en cessation de paiement avant d’être déclaré en faillite.
La division automobile jugée rentable va renaître rapidement de ses cendres grâce à sa reprise par son ancien Directeur, M. Berthier, qui relance dès 1910 la production sous la nouvelle dénomination : « Société Nouvelle de La Buire Automobile ».
Le reste de l’activité industrielle et une partie de l’usine seront cédés d’autre part à la « Compagnie Electro Mécanique » suite à la faillite de 1909.
L’activité reprend et pour montrer à ses concurrents lyonnais Berliet en tête que La Buire est de retour là où on ne l’attendait plus, le bureau d’études est chargé de mettre l’accent sur l’innovation technique vecteur d’image de marque.
C’est ainsi que la firme présente de nombreux brevets tel que le graissage du moteur par barbotage à niveau constant.
Le niveau des ventes retrouve une certaine vitalité tout comme celui de la trésorerie qui fait l’objet d’attention particulière pour mieux contrer les vieux démons du passé tel que la compétition qui n’a plus la cote chez La Buire.
Cette dernière consentira néanmoins d’inscrire une de ses voitures dans une course russe en 1911 …. qu’elle remportera avec à la clef une promotion inattendue pour une course secondaire.
La guerre éclatant, l’usine tourne à plein régime pour fournir en camions, voitures de liaison et remorques porte char les énormes besoins de l’armée française bref de quoi remplir à bon compte les caisses de l’entreprise.
Forte de son trésor de guerre, les chaînes de production sont déménagées des vieux locaux du quartier La Buire en 1919 dans la nouvelle usine de Lyon-Montplaisir d’où sort la Buire 12cv et son radiateur coupe vent.
Malheureusement les énormes investissements consentis pour rajeunir l’outil de production ont du mal à trouver leur amortissement faute à des ventes qui ne décollent pas.
Le départ de Berthier jusqu’alors gardien moral de la marque sera le point de départ du déclin de La Buire à la tête de laquelle plusieurs directions vont se succéder laissant peu à peu se réinstaller les maux qui avaient causé sa première perte dix ans plus tôt.
En effet, l’entreprise fait le pari malheureux en 1922 de miser sur la compétition si longtemps mise de coté afin de trouver un nouvel élan.
Malheureusement les nombreuses victoires en course de côte n’ont pas l’effet escompté sur les ventes si bien que peu à peu la trésorerie de l’entreprise s’amenuise jusqu’à devenir critique pour financer l’innovation indispensable au renouvellement de la gamme qui doit se contenter d’améliorations pour subsister dans une concurrence de plus en plus agressive.
La marque cesse trois ans plus tard la production de ses véhicules utilitaires conçus avant guerre et devenus obsolètes par manque d’investissement à leur remplacement.
Coté voitures particulières le constat n’est pas plus rose car le projet d’une 14cv moderne est abandonné faute de moyen au profit d’un replâtrage de la 12cv qui se mue par magie en 10cv mais ce subterfuge ne trompe personne et certains concessionnaires doivent se tourner vers d’autres marques à distribuer pour survivre tant les ventes sont basses.
La fin de la marque La Buire frôle le pathétique car l’usine sort de manière chaotique une automobile obsolète dont la seule innovation est le passage de vitesse au plancher et que de rares illuminés achètent alors au prix fort en raison des coûts de construction rendu exorbitants par une production fantomatique et dont l’entretien n’est quasiment plus garanti faute d’un réel réseau de concessionnaires !
L’agonie durera jusqu’en 1930 date à laquelle l’usine est cédée au Ministère de la Défense qui transformera les lieux en magasin de stockage pour le Génie..
Aujourd’hui des vastes Chantier La Buire ne restent plus que quelques arpents isolés et occupés soit par des sociétés commerciales ou un lieu de culture grâce auquel est sauvegardé une relique industrielle du passé.
L’usine de Montplaisir est passée depuis longtemps aux Domaines de l’Etat qui fut sa planche de salut mais la désaffection des lieux lui garantira t’elle encore longtemps de survivre dans un tissus urbain avide d’espace à remodeler ?
†