Jacques Bignan fut avant tout l’animateur des « Etablissements Industriels Bignan » une société de mécanique de précision sise à Courbevoie au 15 de la rue de Normandie.
Sa principale activité dès 1918 fut celle de motoriste pour de nombreux petits constructeurs automobiles comme « La Perle » qu'il faudra surement un jour ou l'autre penser à exhumer aussi ...
Son principal fait d’arme de l'époque fut la sortie d'un très réussi petit 1.5 litres dont il confia à l’ingénieur Picker la conception et l’industrialisation.
Il se caractérisait par une étonnante tonicité et une fiabilité qui fit remarquer l’entreprise si bien que l’idée de lancer sa propre automobile de sport germa dans l’esprit de Jacques.
Entrepreneur dans l’âme et flairant le potentiel d’évolution pour son entreprise il conclu un accord de production au sein des ateliers « Grégoire » alors sous exploités et c’est ainsi qu’en 1920 naquit la « Sté des Automobiles Bignan » à Clichy.
Bignan sut immédiatement apporter son soucis de la précision dans la conception de son premier modèle dont chaque éléments du châssis furent étudiés afin d’allier légèreté et solidité à l’image de cette cigogne en plein vol qui ornera désormais les sublimes radiateurs de la firme aux lignes purement classiques.
A noter que les BIGNAN vendues au Royaume-Uni le furent sous la marque "GREGOIRE" qui à l'époque encore jouissait d'une certaine aura .... mais ceci perdura peu de temps car comme nous le verrons BIGNAN éclipsera très vite son prête nom ....
Coté motorisation, on adopte un moteur conçu avant guerre, un 4 cylindres à soupapes latérales inclinées d’une cylindrée de 3.4 litres entrainant l’automobile à plus de 100 km/h et que le pilote soit rassuré son bolide lui assure la sécurité d’un essieu avant à tambours « Perrot-Piganeau » et un servofrein autorégulateur « Hallot » un must à l’époque où d’autres marques n’offraient que des freins sur les roues arrières et ou sur la transmission !
Rapidement une clientèle de pilotes porte la marque en compétition et même si le moteur n’est pas de toute fraicheur dans sa conception la firme parvint à taquiner au Mans des concurrents de haute volée tel que Bugatti, Ballot ou Peugeot rien que cela !
Profitant de l’intérêt d’un de ses clients constructeurs pour ce moteur, Jacques Bignan lui en céda les droits d’exploitation ce qui lui permis de financer une grande partie de la conception de son nouveau 4 cylindres à arbre à came en tête et 16 soupapes de 3 litres de cylindrée développant 95 ch contre 55 pour l’ancien 3.5 litres !
Ce nouveau modèle à l’allure surbaissée connu le succès dès sa sortie en 1921 avec une victoire magnifique sur les routes cassantes et éprouvantes du GP de Corse de quoi asseoir définitivement la notorièté de la marque !
Malheureusement ce modèle fut assez peu produit du fait d’une modification dans le règlement des Grands Prix réservant la compétition aux seules 2 litres dès 1922 !
Un coup dur pour la trésorerie de la firme qui se trouva privée du retour sur investissement du moteur 3 litres et si la pillule bien qu’amère fut avalée, Jacques y laissera son pécule de guerre et sera contraint de vendre son autonomie aux banquiers pour parvenir à financer l’étude du nouveau 2 litres de 65ch !
L’ingénieur Causan parvint à réaliser un tour de maître en concevant une pièce d’orfêvrerie mécanique à commande desmodromique un ingénieux système quoi que complexe qui permet le rappel mécanique des soupapes en lieu et place des ressorts.
Ce moteur s’illustra au Mans où la firme s’octroya les 3ème et 4ème places mais déçu par la mise au point délicate des réglages, le mentor de la firme décide en 1923 de revenir à la version « classique » de ce moteur soit un 2litres de 75ch à distribution par arbre à cames en tête et deux soupapes par cylindre qui ne parvint pas à donner plus d’éclat aux performances la firme puisqu’elle conserva ses 3éme et 4éme places au Mans 1923 derriere le duo Chenard&Walker .
Durant les trois années suivantes, ce moteur fit le bonheur des clients lors des courses de côte alors très fréquente à l’époque mais en dehors du Record du Monde d’endurance (3000km) remporté avec brio à Montlhéry et la victoire au GP de Belgique tous deux en 1924, le département compétition fut sacrifié en 1926 compte tenu du peu de notorièté que les banquiers dégageait des nombreuses victoires de la firme sur des compétitions secondaires car pour se maintenir financièrement en compétition les actionnaires attendaient d’avantage d’une victoire au Mans que tout autre chose or là Bignan était loin d’être au niveau requis pour combattre les Bugatti 2 litres !
voici un cliché de la Bignan 2 litres en 1925 .... une beau torpédo sportif !
La conversion de ces modèles de compétition élitistes en séduisantes routières hi-tech de grand tourisme ne permis pas à l’entreprise de sortir du cercle fermé des clients-pilotes et la faillite fut déclarée faute de ressources !
Comme tant d’autres Jacques Bignan acculé financièrement fut contraint de céder son entreprise à ses créanciers et dès 1926 la firme est revendue à la CGA (Carrosserie Générale Automobile) qui annexe juridiquement la firme aux « Etablissements Henri Precloux » dont elle est propriétaire tout en conservant la marque commerciale Bignan.
La nouvelle direction consciente que produire une dizaine de véhicules par an n’est plus dans l’air du temps décide de populariser son offre en proposant entre autre un cyclecar qui n’est qu’autre que la copie conforme sous licence du très réussi Salmson VAL auquel est rajouté le célèbre radiateur classique Bignan orné de la non moins évocatrice cigogne !
Succès immédiat pour cet hybride marketing qui redonne des couleurs à la marque en flattant ces clients par l’aura de son nom mais à lui seul ce cyclecar acheté quasi réalisé à « Salmson » ne suffit pas à remettre la firme sur les rails et dans l’urgence on choisi de se diversifier sur le secteur du luxe bourgeois en présentant en 1927 une lourde 6 cylindres 2 litres qui ne trouva jamais son public !
Alors que les pertes s’accumulent la firme se suicide en présentant dès 1928 une ostentatoire limousine à moteur 8 cylindres SCAP dont semble t’il aucun autre exemplaire que le prototype ne fut vendu ….
Un enterrement de première classe cette année là pour une firme d’exception même si l’entreprise resta signalée dans le répertoire des constructeurs jusqu’en 1933 par le simple fait que la firme assura encore quelques années une mission d’entretien mécanique auprès de sa clientèle dans un obscure atelier de la banlieue parisienne …..